Les noces napolitaines d’Elena Ferrante
Par Florence Noiville
Elena Ferrante n’existe pas. C’est un nom de plume. Six syllabes lumineuses et chantantes – choisies en hommage à Elsa Morante (1912-1985). Six sons voyelles érigés en paravent. Pour cacher qui ? Un auteur dont on ne connaîtra peut-être jamais l’identité. Un auteur anachronique – quasi-extraterrestre – qui s’intéresse plus au lecteur qu’à lui-même. Au diable la célébrité, les interviews, les paroles, l’argent, les réseaux sociaux, le bruit, la lumière… semble nous dire Elena Ferrante. Au diable « moi ». Ce qui m’intéresse, c’est vous !
Et ça marche. C’est fascinant comme ça marche. L’effet que cela fait. Ses mots, ses métaphores, ses descriptions charnelles, tout cela s’insinue sous la peau. Et ne s’en va pas. D’abord, on est projeté dans Naples. Dans les années 1950-1960. Un faubourg pauvre, pourri par la corruption. Une ville qui pue et qui tue. Sur cet envers de décor, Ferrante accroche une guirlande de personnages hauts en couleur – couleurs primaires et crues –, retraçant notamment cinquante ans d’une relation tumultueuse entre Lila Cerullo et Elena Greco, deux fortes têtes dont l’emprise sur le lecteur n’a d’égal que l’amitié-passion-hypnose-amour-haine qu’elles nourrissent l’une pour l’autre.
Il y a quelque chose d’addictif dans l’écriture de Ferrante. Pas étonnant qu’elle ait déjà séduit un million de lecteurs dans le monde. En France, sa percée…
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